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Source : France Culture

Matisse, roman et poème


L'écrivain Louis Aragon

a consacré pendant plusieurs années une grande fresque romanesque et poétique

au peintre Henri Matisse.

Les œuvres de ce dernier

ornent l'édition du livre,

achevé par le romancier

après la mort

d'Elsa Triolet.

Pour parler du livre Henri Matisse, roman écrit par Louis Aragon, et pour lequel il a également choisi les illustrations, nous sommes avec Olivier Barbarant. Poète, critique, essayiste, il est spécialiste de l’œuvre d'Aragon dont il a notamment édité les œuvres dans la Bibliothèque de la Pléiade.

Il y a entre Aragon et Matisse une admiration réciproque, même si les deux artistes ne sont pas engagés de la même manière dans leur siècle. Il peut paraître étonnant qu'Aragon s'intéresse à un artiste moins engagé politiquement, mais c'est précisément le fait que Matisse soit en quelque sorte dégagé de l'horizon historique qui le fascine : "l'évidence du génie lui prouve qu'il y a une puissance de l'art plus forte que celle de l'engagement". Face aux bouleversements et aux horreurs du XXe siècle, Matisse propose autre chose : "la seule réponse au néant se trouve peut-être dans le fait de décorer l'horreur, de donner de la lumière". C'est pourquoi Aragon, qui a minutieusement choisi les œuvres représentées dans l'édition de son texte, fait figurer à la toute fin de son livre un bouquet multicolore de Matisse :

Ainsi s'achève, sur cet éclatement, ce bouquet d'artifice, sur ce feu de signes végétaux, ce livre que tu ne liras jamais, Elsa(et je me demande pour qui je le laisse aujourd'hui publier), ce livre dont tu n'auras guère connu çà et là que les morceaux parus, car tu ne voulais plus connaître ce que j'y rajoutais que lorsque ce serait fini, que ce serait enfin un livre, que ce serait devenu un livre.

La douleur d'Aragon est perceptible, puisqu'il publie son texte un an après la mort d'Elsa, dont Matisse avait réalisé plusieurs portraits. Comme l'explique Olivier Barbarant, "les deux créateurs se sont renvoyés en miroir des choses", comme si l'écrivain lançait au peintre un défi, et inversement. Matisse disait par exemple qu'il n'avait jamais vraiment réussi à "cerner" Aragon, la plasticité de son visage, dans les portraits qu'il avait pu faire de lui.

Étonnante relation que celle du communiste engagé admirant la chapelle du Rosaire à Vence... "La chapelle est comme une sorte de nouveau livre pour Matisse, mais un livre de grande composition", nous dit Olivier Barbarant.

Finalement, Aragon trouve peut-être en Matisse "une sorte de père créateur rêvé". Les deux artistes répondent à la tragédie de leur siècle de deux manières, toutes aussi fécondes l'une que l'autre, l'un en s'engageant par les mots et la poésie, l'autre en surplombant l'histoire par la couleur et la lumière. Les boucles des cheveux des modèles de Matisse répondent en écho aux boucles syntaxiques de l'écriture d'Aragon : A la limpidité matissienne répond la profusion aragonienne - Olivier Barbarant.

Pour écouter l'émission, cliquer ICI


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